Tandis que notre ouvrage « Question à Toits Multiples » est sous presse pour paraître courant novembre, nous sommes allés à la rencontre d’un opérateur phare en matière de coliving, nouveau produit résidentiel en plein essor. Depuis l’ouverture de sa première résidence il y a quelques années, « The Babel Community » connaît une rapide expansion, qu’entend bien conforter son directeur de développement, Grégory Cardona.
– Pouvez-vous présenter « THE BABEL COMMUNITY», votre historique et vos objectifs futurs ?
“The Babel Community est un concept de résidence hybride de coliving où l’on peut à la fois vivre, travailler, se divertir, faire du sport, et surtout se rencontrer. Ce sont des résidences qui sont ouvertes sur l’extérieur avec plusieurs espaces de vie, comme un restaurant, un cinéclub, une salle de sport et des espaces d’évènements, qui vont permettre de créer du lien entre les résidents, les gens du quartier et les gens de passage en ville. Nous avons ouvert notre première résidence à Marseille rue de la République en 2017 sur un bâtiment de 5000m². C’était une opération de réhabilitation d’un bâtiment existant offrant des espaces de coliving, coworking, ainsi qu’un lieu ouvert sur l’extérieur.
Pour revenir sur la genèse de The Babel Community, nous sommes une filiale du groupe Axis créé en 2004 à Marseille et initialement positionnée en tant qu’agence tiers de colocation, « The Colivers », qui existe toujours et sous laquelle nous gérons aujourd’hui 600 lots. Le concept « The Babel Community » est né avec l’objectif de proposer une expérience client avec plus de services, de partage et de liens pour des clients. Nos clients sont des jeunes actifs âgés de 25 à 40 ans ou des personnes en transition de vie professionnelle ou familiale. Ce profil type regroupe des scénarii de vie très variés, comme par exemple des gens qui sont en période d’essai, en mobilité professionnelle ou nouvel arrivant dans une ville et qui ne trouvent pas leur bonheur sur le marché locatif classique.
Nous avons l’intime conviction que l’habitat, le bureau, les loisirs devaient s’envisager de façon globale. Il y a une demande très forte pour notre offre, en atteste notre taux d’occupation de 98%. Nous portons l’objectif d’un maillage national avec 25 résidences d’ici 2025 sur des surfaces entre 5000 et 15000 m² dans les grandes métropoles françaises. Aujourd’hui nous avons deux résidences en exploitation, celle de Marseille et une autre à Montpellier. Nous avons 6 résidences en cours de développement à Bordeaux, Lille, Paris, Grenoble, Aix en Provence et une deuxième résidence à Marseille. Nous intervenons comme investisseur et exploitant de nos résidences. Nous sommes accompagnés dans notre développement par la Caisse des Dépôts qui intervient comme partenaire co-investisseur dans la détention des murs à long terme.”
– Quels sont les facteurs qui expliquent l’émergence du coliving et en quoi cela peut influer votre géographie d’implantation ?
“L’émergence du coliving est liée à plusieurs constats, le premier étant le fait que cette génération de jeunes actifs reste célibataire de plus en plus tardivement et qu’il y a un sentiment de solitude largement partagé dans les grandes métropoles. Le deuxième constat est que l’offre locative n’a pas évolué depuis des années, il est de plus en plus complexe et onéreux d’accéder au logement dans ces grandes métropoles françaises, avec des démarches administratives lourdes et souvent déconnectées de la réalité de vie de cette catégorie d’âge. Le troisième point est l’évolution de l’ère de la propriété à celle de l’usage. On devient propriétaire plus tardivement et l’on veut emménager plus rapidement dans un appartement.
Ces facteurs amènent notre offre à se concentrer aujourd’hui davantage dans les grandes métropoles françaises, dans des cœurs de ville ou parfois en périphérie, à conditions d’être bien desservis en transport en commun, c’est-à-dire à moins de 10 minutes d’un métro ou d’un tramway et à moins de 30 minutes du centre-ville. Le profil de notre public justifie cette géographie et cette proximité au transport en commun. Nous pourrions envisager de développer du coliving dans des villes petites et moyennes, mais sûrement sur des gabarits plus petits que ceux que l’on développe aujourd’hui.”
– Vous effectuez d’abord un travail de repérage pour cibler les fonciers intéressants ou mobilisez-vous les collectivités ? Dans ce cas-là, les élus sont-ils plutôt réceptifs ?
“Ces deux schémas de développement peuvent exister. Soit ce sont des fonciers que nous identifions via un réseau de commercialisateurs ou de promoteurs qui sont des partenaires avec lesquels nous travaillons, soit ce sont les collectivités qui nous orientent vers des actifs tels que des bâtiments à réhabiliter ou des terrains nus. De manière générale, les collectivités voient d’un très bon œil l’installation de nos résidences sur leur territoire. A la fois en termes d’attractivité car nous proposons une solution d’hébergement adaptée pour les nouveaux arrivants en mobilité, et également car nos résidences sont ouvertes sur l’extérieur et sont conçues pour devenir de vrais lieux de vie très animés qui participent à la dynamique d’un quartier. Enfin nous créons de l’emploi pour la gestion de nos résidences.”
– On s’interroge souvent sur la différence ténue qui peut exister entre les résidences étudiantes, le coliving, la colocation ou l’offre hôtelière ?
“On se distingue de la résidence étudiante d’abord par les formats et la qualité d’hébergement que l’on propose. Nous sommes plutôt sur des tailles moyennes de 26 à 27m² là où la résidence étudiante sera plutôt de 18 à 20m², nos appartements sont ultra-équipés et prêts à vivre. Nous nous distinguons également par le panel de services et d’évènements que l’on propose. Nous pensons nos résidences comme de véritables lieux de vie avec une communauté vivante qui s’y rencontre. Beaucoup plus qu’un appartement en somme. Par rapport aux solutions appart hôtels, nous nous distinguons tout d’abord par la durée moyenne de séjour qui est de 6-8 mois, là où la durée moyenne observée en appart-hôtel est de 2 à 3 nuitées. Nous n’adressons donc pas du tout le même public ni le même besoin. Ensuite nos tarifs sont beaucoup plus abordables que ceux d’une solution appart hôtel puisque nous avons une offre d’appartement à partager à partir de 580 euros / mois et d’appartement individuel à partir de 740 euros / mois, là où une solution appart’hotel se situe autour de 2000€/mois.”
– Et en termes règlementaires, quels retours avez-vous des collectivités qui souhaitent inscrire le coliving dans leur document d’urbanisme, via les sous-destinations des Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) ?
“C’est une vraie question, mais je ne pense pas que l’on puisse faire rentrer le coliving dans une case puisqu’il y a plusieurs opérateurs et plusieurs typologies d’offre. Nous nous positionnons clairement sur une solution qui offre tous les services que l’on peut retrouver au sein d’un hôtel, mais on peut être aussi amené à organiser de la nuitée sur une partie de la programmation. Cela est lié à un retour d’expérience que l’on a eu à Marseille où nos clients souhaitaient pouvoir accueillir leurs proches quand ils venaient leur rendre visite. C’est pour ça que nous nous développons en sous destination « sous-hébergement hôtelier » étant donné qu’on propose tous les services d’un hôtel. De plus, tous nos bâtiments sont « Etablissement Recevant du Public » (ERP). La vraie particularité de l’offre The Babel Community est la combinaison Coliving / Coworking, qui nous semble encore plus pertinente aujourd’hui avec la généralisation du télétravail, et l’ouverture sur l’extérieur. Nous développons des résidences inclusives.”
– Comment le coliving s’intègre-t-il dans le montage des opérations ?
“Nous nous développons sur la réhabilitation de bâtiments existants ou bien sur des ensembles immobiliers neufs. Notre offre est tout à fait compatible dans le cadre de développement d’ensemble avec une programmation de logement classique ou de bureaux. En effet nous proposons pour les habitants du quartier un lieu de vie ouvert à tous avec un espace de coworking, une offre de services avec un restaurant, des cours de sport, des évènements pour les habitants du quartier. Pour les entreprises, nous sommes une solution pour héberger leurs salariés en mission ou formation pour quelques mois ou nouvellement embauchés, également nous proposons une offre de bureaux complémentaires pour leur besoins ponctuels.
Le caractère hybride de nos bâtiments nous permet de mutualiser à la fois nos espaces – avec par exemple une salle de sport utilisée par différents publics à différents moments de la journée – mais aussi nos équipes d’exploitation.”
– Votre activité n’a pas été impactée par la crise sanitaire et le confinement, cela montre bien que la mixité fonctionnelle au sein d’un espace restreint permise par le coliving répond pleinement aux enjeux actuels ?
“Effectivement, nous n’avons pas été impactés sur notre offre de coliving par le contexte COVID. C’est vrai que le contexte actuel encourage le télétravail qui va de plus en plus rentrer dans les mœurs. Nous sommes une solution qui permet d’avoir des espaces de vie et de travail à proximité tout en ayant une séparation claire entre les sphères privées et professionnelles. Cette mixité des fonctions fait particulièrement sens dans l’actualité sanitaire. Ce que nous proposons avec les résidences The Babel Community, c’est le télétravail haut de gamme, au pied de son immeuble. L’épisode du confinement a également mis en exergue la volonté des Français de retrouver du lien social et de l’importance de la communauté au sens large. C’est également une de nos ambitions avec le concept The Babel Community : créer une communauté vibrante et casser la solitude dans les grandes métropoles françaises.”
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