Christian Dubois © Nexity Non-Profit

Depuis plus de 2 ans, Nexity-Non-Profit, filiale du groupe Nexity, mène des actions pour répondre aux besoins résidentiels des plus précaires, en s’inscrivant dans les objectifs du Plan Logement d’Abord formulés par le Gouvernement en 2017. Retour sur les dispositifs développés par Nexity-Non-Profit avec Christian Dubois, créateur de la filiale.

– Pouvez-vous présenter « Nexity-Non-Profit », vos objectifs et vos actions ?  

« Nexity-Non-Profit est une démarche que j’ai proposé au groupe Nexity en me disant que nous ne pouvions pas être le premier promoteur immobilier de France et ne pas s’intéresser au logement pour ceux qui n’en ont pas. Avec les nombreux savoir-faire dont nous disposons, nous pouvons aider l’Etat, les associations et les collectivités territoriales à avancer sur ces sujets difficiles. J’ai travaillé pendant 6 mois au début de l’année 2018, en ayant notamment la chance d’être aidé par l’ancienne ministre du logement, Emmanuelle Cosse. Nous avons été rapidement convaincus du fait que les acteurs privés peuvent bel et bien s’emparer de ces sujets. La première précaution que nous avons prise était de stipuler que les activités seraient sans profit pour le groupe. »

– Quelles sont les différentes solutions que vous développez et dans quelle mesure sont-elles complémentaires ?

« Nous nous sommes définis trois axes d’intervention. Le premier est la construction d’établissements qui peuvent accueillir des gens en difficulté et des gens de la rue, des pensions de famille. Ce sont des établissements normés entre 18 et 25 studios, dans lesquels les occupants sont chez eux, contrairement à l’hébergement. Le schéma veut qu’il y ait deux travailleurs sociaux qui travaillent dans la pension de famille (les hôtes) et accompagnent les habitants avec des bénévoles. C’est un accompagnement au quotidien sur le volet administratif et dans la vie quotidienne de l’établissement. En plus des pensions de famille, nous travaillons à la réalisation de centres d’hébergement d’urgence et nous avons livré le premier à Périgueux. Plus récemment, nous nous sommes intéressés à l’accueil des travailleurs saisonniers dans les zones touristiques. C’est un sujet qui m’a été proposé par une commune du Var, ces salariés rencontrent des problèmes pour leur logement pendant la saison sans solution satisfaisante. »

– Pouvez-vous revenir sur la gestion d’une pension de famille et le montage d’une telle opération ?

« Nous n’assurons pas la gestion car ce n’est pas notre métier. C’est le rôle des associations. Nous intervenons sur la partie immobilière. Nous avons signé des accords avec de nombreuses associations ou fédérations d’associations comme la Fédération des Acteurs de la Solidarité qui regroupe plus de 800 adhérents. Nous avons été très bien accueillis. Dans une pension de famille ou un centre d’hébergement, il y a le volet social et le projet immobilier. C’est la rencontre des deux qui fait que l’opération peut se réaliser. Notre action est d’accompagner les associations dans la partie immobilière de leur projet.

Quand nous réalisons l’opération, nous vendons le bien à un investisseur, lequel est très souvent un bailleur social. Ça peut aussi être une foncière car certaines associations comme Habitat et Humanisme développent ce type de structures et peut-être aussi être demain des fonds d’investissement privés ayant une démarche de solidarité. Nous mettons en place l’ingénierie autour de l’opération, nous aidons aux financements du fait de notre convention nationale avec l’Etat. Les financements mobilisés sont ceux du logement social et du Prêt Locatif Aidé d’Intégration (PLAI). »

– Enfin, pour finir sur les pensions de famille, quels sont les retours des élus locaux ?

« Les pensions de famille sont un moyen de répondre aux obligations de logements sociaux sans avoir nécessité d’établissements scolaires par exemple. Etant donné que les établissements sont petits et accueillent des publics célibataires, la question ne se pose pas. Le volume limité de l’établissement facilite son intégration dans le quartier. Ce sont surtout des gens fragiles qui sont logés dans les pensions de famille. L’accompagnement au quotidien permet de conforter cela. Nous avons organisé de nombreuses visites de pensions de famille avec les collaborateurs de Nexity et quelque fois avec des élus, et très souvent ces derniers sont convaincus du bien-fondé de la démarche alors qu’ils pouvaient avoir des réticences avant. Enfin, comme à La Ciotat par exemple, la pension de famille n’est pas toujours un objet unique, elle est souvent intégrée à une copropriété plus importante.

Aujourd’hui nous avons soixante-deux projets avec deux réalisations achevées, celles de La Ciotat et de Périgueux. Un chantier est déjà en cours en région parisienne à Cergy et un autre va bientôt démarrer à Arles. Pour résumer, nous avons une douzaine d’opérations en cours de réalisation et une cinquantaine de projets qui sont à différents stades d’avancement, à la fois des opérations propres à Nexity et des projets pour lesquels ce sont des associations qui nous sollicitent sur le volet immobilier. »

– Au-delà de la construction immobilière, vous intervenez sur le dispositif « Louer Abordable », pouvez-vous nous présenter ce type d’intervention ?

« Encore une fois, cette action s’inscrit dans le cadre du Plan Logement d’Abord, en partant du constat qu’environ 3 millions de logements sont vacants en France, c’est beaucoup trop. Nous nous sommes d’abord posés la question de pourquoi ces logements restaient vacants. Cela peut être pour des raisons d’insalubrité qui nécessitent d’engager des travaux importants, ça peut être le fait qu’ils ne sont plus au goût du jour, ou parce que les propriétaires choisissent de les laisser vides… Nous proposons à ces propriétaires une solution qui leur permet de mettre leur bien en location en passant par une association. Celle-ci assure la liaison avec les occupants, garantit le paiement du loyer, et veille à ce que le logement soit remis en état lorsque la location se termine.  Nous nous sommes donc lancés dans cette démarche avec l’appui de l’Agence Nationale de l’Habitat (ANAH). Nous en sommes aujourd’hui à environ 300 baux signés, soit près de 900 personnes accueillies. »

– Êtes-vous en mesure de fournir un retour d’expérience sur ce dispositif d’intermédiation locative, notamment ses conditions de réussite ?

« Nous rencontrons certaines difficultés sur ce sujet-là. Nous nous sommes notamment aperçus que dans ces 300 logements loués, assez peu relèvent effectivement de l’intermédiation locative (IML), dont le montage est très complexe. Le problème se joue notamment dans la temporalité de mise en œuvre du dispositif et de l’obtention des agréments. L’IML permet au propriétaire de défiscaliser de façon importante (jusqu’à 85%) le loyer perçu et à la commune d’inscrire les logements concernés dans les inventaires SRU. »

– Les propriétaires sont-ils au courant de l’existence de ces dispositifs ?

« Assez peu finalement, nous nous sommes rendu compte qu’ils n’avaient pas fait l’objet de beaucoup de promotion. Ce sont des actions qui sont assez techniques, mais en présentant bien les choses aux propriétaires, ces derniers sont finalement assez partants. Je ne vois pas beaucoup de choses à changer à ce niveau-là. Ce qu’il faut, c’est avant tout de la pédagogie et une rapidité dans la mise en œuvre des dispositifs. »

– Le troisième volet sur lequel vous intervenez est celui de l’occupation transitoire. Comment vous-êtes-vous positionné sur ce sujet particulièrement en vogue ?

« En tant qu’acteur immobilier, un terrain inoccupé ou un bâti sous-utilisé, est notre matière première, mais avant que celle-ci soit mobilisée dans le cadre d’un projet, il existe toute une période pendant laquelle nous pourrions trouver une utilité autre. Le bien pourrait être mis à disposition d’une association qui va l’occuper. Nous avons peu de projets là-dessus car c’est vraiment nouveau pour nous, mais c’est un sujet d’avenir sur lequel nous souhaitons nous positionner. C’est un sujet qui peut bénéficier des nouvelles solutions en matière de construction modulaire et qui permet finalement de créer des opportunités d’accueil complémentaires. »

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